
Étienne Andriamampandry, responsable des partenariats à l’OSDRM
Face aux défis climatiques, à la dégradation des sols et à la précarité alimentaire, les paysans malgaches s’appuient sur deux approches agroécologiques locales : le Système de Riziculture Zanatany (SRZ) et la rizipisciculture. Ces pratiques allient savoir-faire traditionnel et innovation pour produire durablement tout en améliorant la sécurité nutritionnelle.
Né de la recherche et de l’expérimentation paysanne, le Système de Riziculture Zanatany (SRZ), développé par l’OSDRM (Organisation pour le Soutien du Développement Rural à Madagascar) dans le cadre du projet SANIDA (Sécurité Alimentaire et Nutrition par l’Intensification et la Diversification Agroécologique), repose sur le semis direct, la rotation et l’association de cultures, ainsi que sur l’utilisation d’intrants naturels tels que le compost. La technique du semis direct permet de déposer les graines directement dans le sol sans repiquage.
« Grâce au SRZ, les paysans de la région Analamanga ont réduit de deux mois la période de soudure », explique Étienne Andriamampandry, responsable des partenariats à l’OSDRM, lors de l’atelier Interface Recherche et Développement organisé par le GSDM à Antsirabe en février 2025.
Cette technique a permis d’accroître la diversité alimentaire des paysans, d’améliorer la production de riz et de cultiver d’autres plantes, comme le haricot ou la fraise. Elle contribue également à diversifier les sources de revenus et à améliorer la nutrition des familles.
Introduit en 2012, le SRZ bénéficie aujourd’hui à plus de 70 000 paysans répartis dans huit régions de Madagascar : Sofia, Diana, Analamanga, Itasy, Vakinankaratra, Analanjirofo et Melaky.
« Si la moyenne de rendement était de 2,5 tonnes par hectare, elle atteint désormais 4,8 tonnes par hectare chez les paysans pratiquant le SRZ. Cette technique ne dépend pas de semences spécifiques : elle valorise les variétés locales tout en favorisant l’adoption progressive de semences améliorées issues de la recherche », souligne Andriamampandry Étienne.
En plus d’améliorer les rendements, le SRZ renforce la résilience face aux retards de pluie et contribue à restaurer la fertilité des sols grâce à l’utilisation de plantes de couverture.

Rizipisciculture à Miarinarivo, Association Ampinga
Autre innovation prometteuse, la rizipisciculture est promue notamment par le projet ALEFA Agroécologie, porté par l’APDRA. Cette approche combine la culture du riz avec l’élevage de poissons – principalement des carpes – dans les rizières. Elle permet d’optimiser l’usage de l’eau et d’obtenir deux récoltes complémentaires sur une même parcelle.
« Quand on utilise des produits chimiques dans les rizières, les poissons meurent. Avec la rizipisciculture, on limite les intrants et on augmente les rendements. On considère cette technique comme une pratique agroécologique. Concrètement, on utilise très peu d’intrants chimiques et on optimise l’exploitation de la rizière : on produit à la fois du riz et du poisson, ce qui augmente les revenus des paysans. De plus, la carpe joue un rôle essentiel dans l’écosystème de la rizière : elle se déplace dans l’eau, sarcle les jeunes herbes, consomme les petits insectes vecteurs de maladies et produit un fumier naturel qui enrichit le sol », explique Philippe Martel, coordinateur du projet ALEFA.
Les rendements en riz passent de 3 à 3,3 tonnes par hectare, et la production de poissons atteint 200 à 300 kg par hectare. « Même 30 kg de poissons représentent environ 450 000 Ariary, ce qui constitue une source de revenus précieuse pour les familles rurales », souligne-t-il.
Au-delà des gains économiques, la rizipisciculture améliore la qualité nutritionnelle de l’alimentation grâce à l’apport de protéines animales locales, essentielles à la croissance des enfants. Le projet ALEFA, déployé entre 2022 et 2025, concerne 3 000 paysans des régions Atsinanana, Itasy et Vakinankaratra.
Vers une agriculture durable et productive
SRZ et rizipisciculture ont en commun de concilier productivité et durabilité. L’une agit sur la structure et la fertilité du sol, l’autre sur la valorisation intégrée de l’eau. Ensemble, elles contribuent à renforcer la sécurité alimentaire, stabiliser les revenus et préserver les ressources naturelles.
« L’agroécologie n’est pas une utopie. C’est un investissement concret dans la sécurité alimentaire et le bien-être des familles rurales », résument les participants à la deuxième édition de l’atelier Interface Recherche et Développement.
Ra-Nirina









